DOI article:
Genevay, Antoine: Art dramatique - Frédérick Lemaitre, [2]
DOI Page / Citation link: https://doi.org/10.11588/diglit.16689#0325
ART DRAMATIQUE
RÉDÉRICK LEMAITRE
(1800-1876)
(M«<0
près avoir passé à l'Odéon Frederick Lemaître revint à la Porte-Saint-
Martin où, entre autres créations de lui, il faut citer deux, rôles hors de
pair : Richard dans Richard d'Arlington et Gennaro dans Lucrèce Borgia.
Lors de la distribution des rôles de ce drame, Victor Hugo lui offrit,
ou celui d'Alphonse d'Esté ou celui de Gennaro. Frédérick prit le dernier
en disant : « Le premier est d'un effet certain; l'autre, au contraire, me
semble scabreux, il a surtout un mot terrible. — « Ah! vous êtes ma tante! »
— Je serai donc Gennaro. » Il fut admirable et les vieux amateurs se sou-
viennent encore de l'accent fatal avec lequel il disait à Lucrèce comptant
les cercueils : « Il en manque un sixième, Madame. »
Brouillé avec son directeur, guère plus raisonnable que lui, et poussé par deux désirs fort
légitimes : celui de gagner de l'argent et celui de faire connaître son répertoire déjà si riche, Frédérick
résolut d'entreprendre une tournée en province. Il la révolutionna par son talent et ses témérités,
car, c'était dans sa nature, plus il sentait de résistance, plus il osait. Cependant, malgré ce que l'on
appelait alors la queue de Racine, il obtint de brillantes ovations, et partout ce qui était jeune et
vivant le fêta comme le représentant de l'école romantique dont il a tant contribué à populariser les
œuvres.
De retour à Paris, il entra aux « Folies Dramatiques » et débuta, croyons-nous, le 14 juin 1834,
dans Robert Macaire, pièce qu'il avait écrite en collaboration avec MM. Benjamin Antier et
Amand Lacoste. Cette espèce de continuation de l'Auberge des Adrets, dans laquelle l'acteur s'aban-
donnait à toute sa verve, ht courir Paris et eut l'honneur de servir de matière à un procès. Les colla-
borateurs de Frédérick, sans son consentement, avaient vendu le manuscrit à l'éditeur Barba. Notre
artiste protesta ; de là, une action en justice d'où il sortit victorieux. Le jour des plaidoiries, au moment
où le tribunal se retirait pour délibérer, le président, interpellant facteur, lui demanda s'il avait
quelque chose à ajouter aux paroles de son avocat.
1. Voir tome IV, page 284.
Tome IV.
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RÉDÉRICK LEMAITRE
(1800-1876)
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près avoir passé à l'Odéon Frederick Lemaître revint à la Porte-Saint-
Martin où, entre autres créations de lui, il faut citer deux, rôles hors de
pair : Richard dans Richard d'Arlington et Gennaro dans Lucrèce Borgia.
Lors de la distribution des rôles de ce drame, Victor Hugo lui offrit,
ou celui d'Alphonse d'Esté ou celui de Gennaro. Frédérick prit le dernier
en disant : « Le premier est d'un effet certain; l'autre, au contraire, me
semble scabreux, il a surtout un mot terrible. — « Ah! vous êtes ma tante! »
— Je serai donc Gennaro. » Il fut admirable et les vieux amateurs se sou-
viennent encore de l'accent fatal avec lequel il disait à Lucrèce comptant
les cercueils : « Il en manque un sixième, Madame. »
Brouillé avec son directeur, guère plus raisonnable que lui, et poussé par deux désirs fort
légitimes : celui de gagner de l'argent et celui de faire connaître son répertoire déjà si riche, Frédérick
résolut d'entreprendre une tournée en province. Il la révolutionna par son talent et ses témérités,
car, c'était dans sa nature, plus il sentait de résistance, plus il osait. Cependant, malgré ce que l'on
appelait alors la queue de Racine, il obtint de brillantes ovations, et partout ce qui était jeune et
vivant le fêta comme le représentant de l'école romantique dont il a tant contribué à populariser les
œuvres.
De retour à Paris, il entra aux « Folies Dramatiques » et débuta, croyons-nous, le 14 juin 1834,
dans Robert Macaire, pièce qu'il avait écrite en collaboration avec MM. Benjamin Antier et
Amand Lacoste. Cette espèce de continuation de l'Auberge des Adrets, dans laquelle l'acteur s'aban-
donnait à toute sa verve, ht courir Paris et eut l'honneur de servir de matière à un procès. Les colla-
borateurs de Frédérick, sans son consentement, avaient vendu le manuscrit à l'éditeur Barba. Notre
artiste protesta ; de là, une action en justice d'où il sortit victorieux. Le jour des plaidoiries, au moment
où le tribunal se retirait pour délibérer, le président, interpellant facteur, lui demanda s'il avait
quelque chose à ajouter aux paroles de son avocat.
1. Voir tome IV, page 284.
Tome IV.
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