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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 1)

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Gindriez, Charles: Église Santa Maria delle Grazie à Milan
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https://doi.org/10.11588/diglit.16689#0079

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ÉGLISE SANTA MARIA DELLE GRAZIE

A MILAN

es voyageurs qui ont parcouru l'Italie et qui sont allés à Milan con-
naissent bien l'église Santa Maria délie Grazie. On prend une voiture, on
jette en passant un coup d'oeil à l'église, et l'on entre au couvent voisin
pour admirer la place où fut peinte la Cène de L. de Vinci. Rien de
mieux, puisque l'art a un culte, il peut bien avoir aussi ses reliques. Mais
l'église mérite un peu plus d'attention. L'abside surtout, moitié ruinée,
dépouillée en partie de ses ornements et de ses sculptures, frappe
encore par ses élégantes silhouettes, par les jolies proportions de ses
masses, surtout par ce charme des choses incomplètes que l'imagination
achève; car l'imagination est une fée qui rend au centuple, aux monuments et aux choses, tout ce
qu'ils ont perdu.

Les monuments sont de l'histoire pétrifiée ; et les pierres de cette église, dans leur magnificence,
dans leur ruine et jusque dans les restaurations actuelles, sont les tables lapidaires des annales de l'Italie.
Les dominicains, à l'étroit dans leur couvent de San Eustorgio, s'adressèrent au comte Gasparo Vimer-
cati, général de François Sforza, qui leur donna le quartier des soldats et l'hôpital militaire dont les
portiques furent aisément convertis en cloître au bénéfice des nouveaux possesseurs. Ils étaient donc
logés, mais n'avaient pas d'église. Elle fut aussitôt commencée dès l'année 1465. Le duc François
mourut en 1466 et Vimercati Tannée suivante. Les bons pères furent désolés de la mort de leurs deux
protecteurs, mais ne perdirent pas la tête. Ils se firent recommander par Vimercati mourant à Ludovic
le More; et le nouveau duc les prit en affection, et s'engoua à tel point de la nouvelle construction
qu'il s'en fit non-seulement le protecteur et le banquier, mais encore l'architecte.

En 14^2 l'église était à peu près terminée; le chœur était fini et la coupole commencée. Une
petite chapelle appartenant à la famille Vimercati fut respectée avec soin dans les nouvelles construc-
tions ; c'est la dernière de la nef à gauche, près du chœur. La Vierge qu'on y voit eut de tout temps
le don de faire des miracles, et donna son nom à l'église : Sainte-Marie-des-Grâces.

Cette reconnaissance des dominicains porta bonheur à leur église. On pense bien que les
meilleures grâces de la madone furent pour sa maison. Ce sentiment pourrait sembler égoïste, s'il
n'était si naturel. Il paraît qu'à l'époque où nous en sommes, la nef manquait de profondeur; de plus
le chœur se raccordait mal avec elle, et, la coupole élevée, le mal devenait irréparable. L. de Vinci,
appelé par miracle en ce moment pour peindre les fresques du couvent, vit l'erreur, signala le danger,
et fit arrêter les travaux. Ludovic le More embarrassé rassembla un conseil solennel des architectes
les plus célèbres du temps, écouta respectueusement leurs avis, et ne les suivit point. On ne saurait
lui en vouloir, car il fit démolir le chœur et rebâtir le chevet actuel qui, dans l'ensemble de ses déve-
loppements architectoniques et de la coupole qui le couronne, est certainement un des monuments les
plus remarquables de l'architecture de la Renaissance en Italie. Décidément la nouvelle église venait
sous une bonne étoile; tout cela n'est-il pas merveilleux? La Vierge pour patronne, L. de Vinci pour
voisin, un prince pour architecte, et cette conception étroite d'un pauvre maçon ignorant qui soudain
grandit, se dilate et éclate enfin en un chef-d'œuvre?

Toute cette partie postérieure constitue un édifice à part dans l'œuvre de l'église violemment inter-
rompue à la naissance du chœur. La brutalité avec laquelle les nouvelles constructions sont soudées
aux anciennes, en prouvant que les ordonnateurs l'entendaient bien ainsi, doit désarmer les critiques
 
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