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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 2)

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Heulhard, Arthur: Art dramatique, [3]
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Fouqué, Octave: Art musical, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18878#0080

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I

66 L'

talent de chanteuse, et Riga, un ancien acteur de l'Odéon qui
revient de Russie, nous a donné dans le major Gibraltar une
caricature d'une inénarrable fantaisie. Le succès très franc de
Riga vient confirmer d'une façon éclatante les observations que
je vous ai soumises sur le séjour de nos comédiens à Saint-
Pétersbourg.

La Reine des Halles était précédée d'un prologue de
MM. Tillier et Clerc, sans grande saveur, et accompagnée d'airs

R T.

de M. Varney. Ce musicien, pris d'un accès de libéralité mélo-
dique, nous a fait trop bonne mesure. Dans le prologue,
M"« Baumaine représente la Comédie-Parisienne, vêtue à la
dernière mode et conduisant un duc dans l'avenue des Champs-
Elysées; on a suffisamment goûté cette allégorie hippique, et
pourtant, les Champs-Elysées sont plutôt sur le chemin de la
Cascade que sur celui de la Comédie.

Arthur. H eu l h art.

ART MUSICAL

Théâtre des Folies-Dramatiques : Les Poupées de l'Infante,
opéra-comique en trois actes et quatre tableaux, de MM. Henri
Bocage et Armand Liorat, musique de M. Charles Grisait.

Le théâtre des Folies-Dramatiques avait subi un échec avec
sa dernière pièce, qui appartenait à un genre tout à fait popu-
laire. 11 s'est précipité à l'autre pôle, et nous donne aujourd'hui
une pièce élégante, montée avec luxe, pleine de jolis costumes
et dont l'action se passe dans un milieu royal, au Louvre, à
Rambouillet et à Versailles, du temps de Louis XV. Le ton des
plaisanteries est autre. La musique semble vouloir suivre le
mouvement et devient tout à fait aristocratique : les couplets
de café-concert ont fait place à des mélodies plus distinguées,
avec des terminaisons à la Gounod ; l'orchestre et les chœurs
font entendre des harmonies auxquelles ils ne nous avaient point
habitués. N'étaient quelques passages empreints d'une fâcheuse
trivialité, et ceux encore trop nombreux où le trombone d'ac-
compagnement réclame bruyamment ses droits, on pourrait se
croire dans une académie de musique.

Sans doute ce changement d'habitudes a dérouté un peu
les artistes des Folies-Dramatiques. Les répétitions ont été
longues, et la première représentation s'est vu procrastiner,
comme disent les Anglais, presque autant que s'il se fût agi
d'un grand opéra. Ces lenteurs, dignes aussi d'un théâtre acadé-
mique, ont été l'occasion de rapprochements bizarres entre le
colosse et le nain qui occupent les deux extrémités du boule-
vard. Les spectateurs des Poupées de l'Infante se sont demandé,
en voyant le rideau se lever sur un paysage espagnol, si par
hasard le Tribut de Zamora serait en deux journées, dont la
seconde se jouerait place de la République. L'amoureux des
Folies-Dramatiques porte le même nom que celui de l'Opéra :
il s'appelle Manoël. L'un et l'autre ouvrage contiennent une
Marseillaise; seulement celle des Folies est en deux couplets et
dirigée, par une allusion facile, contre un des trois premiers
personnages de l'État, lequel n'est ni M. Grévy, ni M. Léon
Say.

Inutile de pousser plus loin la comparaison : il nous faut
expliquer le sujet des Poupées de l'Infante. Disons d'abord que
de poupées il n'y en a guère : on les aperçoit dans un court
épisode, et elles disparaissent bientôt pour ne plus revenir. Les
poupées de l'infante Marianna, ou plutôt les pantins dont elle
s'amuse, ce sont le roi Louis XV, la camarera mayor dona
Barbara de Roccanegra, et son ridicule époux le vieux don
Inigo, précepteur invraisemblable du jeune Manoël, moins
absurde pourtant que les étonnants diplomates qu'inspire et fait
agir le comte de Viroflay, introducteur des ambassadeurs à la
cour de France.

L'infante dont il s'agit est celle qui, venue à Paris pour
épouser Louis XV, fut brutalement renvoyée à l'avènement du
cardinal de Bourbon. Les descendants de Louis XIV qui régnaient
en Espagne auraient pu mieux attendre d'un parent, et la désin-
volture du cardinal faillit mettre l'Europe en feu. Comme les
causes de cet acte bizarre n'ont jamais été officiellement expli-

quées, le champ restait libre aux inventions des librettistes.
MM. Bocage et Liorat ont supposé un amour entre Marianna
et un jeune étudiant qui, à Madrid, un jour de procession,
s'était jeté dans le Mançanarez pour rattraper un bouquet tombé
des mains de la princesse passant en voiture sur un pont. Les
deux enfants ne se connaissent pas : raison de plus pour qu'ils
s'adorent. De Burgos, où il faisait ses études, jusqu'à Paris.
Manoël suit à cheval la voiture de sa belle, traînant derrière lui
son précepteur haletant. Au terme du voyage, il fait l'impos-
sible pour être présenté à la cour et ne trouve pas d'autre moyen
que de sauver Louis XV, au milieu d'une chasse, en tuant un
cerf furieux qui se précipitait sur la personne royale. Il essaye
alors d'enlever Marianna, mais ne réussit qu'à se faire surprendre
et à agrémenter d'un fandango très pimenté la sérénade que
Louis XV venait offrir à sa fiancée. Au troisième acte, il pénètre
dans les appartements que Marianna occupe au Louvre ; celle-ci
a d'ailleurs fait si bien de son côté que le corps diplomatique,
réuni par le comte de Viroflay, a décidé de prêter les mains à
une autre combinaison matrimoniale. Tandis que Marie Lec-
zinska devient reine de France, l'infante d'Espagne sera libre
d'épouser son Manoël : heureusement pour l'étiquette et l'hon-
neur des familles princières, ce Manoël est un faux étudiant, et,
sous le manteau de l'université, cachait une noble et haute
personne, attendu qu'il est fils du roi de Portugal. C'est ce dont
tout le monde peut se convaincre en le voyant descendre les
degrés de la terrasse de Versailles, au milieu des nombreux
seigneurs de la cour de France, vêtu d'un éblouissant costume
blanc et or.

Dire que les Poupées de l'Infante sont un chef-d'œuvre de
logique, de mouvement et d'action dramatique, serait beaucoup
s'aventurer. La pièce est gaie, ne lui demandons pas davantage.
La musique, de M. Charles Grisart, est agréable à entendre.
Un intérêt particulier s'attachait au début de M"0 Frandin,
premier prix d'opéra au Conservatoire, dans le rôle de Manoël.
La voix de M110 Frandin est courte, et toute son intelligence ne
parvient pas à l'allonger ; mais elle s'en sert avec goût, et cer-
taines notes ont un timbre plein, caressant et doux, qui forcé-
ment mordra sur le public. On lui a redemandé avec fureur la
chanson brésilienne du second acte, laquelle n'a guère d'autre
mérite que de mettre en relief les qualités dont nous venons de
parler.

Le succès de M"0 Frandin n'a pas empêché Mme Simon-
Girard d'obtenir celui auquel elle est accoutumée comme actrice,
comme diseuse et comme danseuse; car il ne se joue plus main-
tenant d'opérette où la première chanteuse n'esquisse un pas
d'une chorégraphie plus ou moins fantaisiste. M. Maugé, qui
joue le rôle du comte de Viroflay, est un comique intéressant ;
M. Luco, dans le précepteur, force le rire par sa bonhomie :
son organe est excellent, et il joue avec franchise et rondeur.
Enfin, on a remarqué M"" Noémie Vernon en Louis XV, et
Adèle Cuinet en camarera mayor.

Une mention élogieuse est due aux décors, peints par
M. Zara, et aux costumes, aussi riches que variés, dessinés par
 
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